mardi 9 novembre 2010

FALLAIT PAS Episode 2 : L'après midi de l'angoisse

Chers amis,



Je vous avais laissés pantelants de frustration, dans l'attente de la suite de ce thriller haletant, voici donc l'épisode 2 des aventures de Jacky.



Nous partîmes donc, lui guilleret, moi déjà fort abattue, vers la galerie marchande de Bonneveine, qui est un peu le Plan de Campagne du 8éme : on y rencontre les mêmes familles hébétées devant les rayons yaourts et produits ménagers de Carrouf, les mêmes enfants obèses en jogging, trainant leur beaufitude congénitale dans leur caddy débordant.
Bref, l'endroit tout désigné pour donner libre cours à ses pensées suicidaires ou gauchistes primaires ("ah elle est belle la France de Sarkozy, le voilà le fleuron de la patrie, de la culture à tous les étages !")...
Jacky fonçait de magasins en magasins, me trainant là où il voulait aller (uniquement des magasins pour homme). A chaque fois que l'on sortait d'une boutique, il me tapotait gentiment l'arrière train comme si j'étais un toutou fidèle et soumis. Nous fîmes une brève escale dans une franchise de montres ; Jacky était fan de montres, il en possédait une dizaine, toutes volées, d'après ses dires. Il aimait collectionner les objets qui pouvaient lui donner l'apparence de l'opulence matérielle : 50 paires de lunettes de soleil, autant de baskets. Il me présentait les modèles, me demandait mon avis, j'hochais la tête distraitement, incapable d'expliquer que le choix de sa prochaine montre n'arrivait pas à éveiller en moi le moindre sursaut d'enthousiasme. Je me laissais glisser dans une torpeur soumise, anéantie par l'ennui. Telle une mouette mazoutée par Totale, je trainais mes pauvres ailes engluées en attendant désespérément l'aide des secours. Je voyais mon bel après midi ensoleillé filer sans aucun espoir d'y glisser une activité un tant soi peu intéressante ou constructive.
Nous entrâmes alors chez Zara Homme, où Jacky se mit à la recherche d'un parfum digne de la virilité sensuelle et raffinée qu'il pensait certainement incarner.

Jacky me tendit alors 2 flacons dont les noms évoquaient certainement d’après leurs créateurs marketing, les concepts de « Irrésistibilité du bois de santal du Vietnam du Nord pour homme beau et riche » et « Senteurs suaves des épices du sud de la France pour le voyageur de l’Infini ». Il voulait mon avis sur ces précieux jus et ainsi éviter l’acquisition dispendieuse d’un parfum olfactivement incompatible avec sa personnalité complexe.



Les sinus anesthésiés et quasi cautérisés par ces 2 émanations de l’industrie pétrochimique, je lançais sobrement cet avis définitif et rebelle : « ben je sais pas, les 2 sont biens non ? ».

J’avais surement éveillé inconsciemment grâce à cette phrase un stimulus criminel chez Jacky. Toujours est-il que je vis son regard s’allumer d’une flamme vicieuse, il cligna des yeux 2 fois et là tout se passa très vite : il s’empara des 2 flacons de démonstration et les glissa dans les poches revolver de son jean. Je le sentais tout fier de son larcin, rempli d’orgueil. Je ricanais nerveusement, effarée, rouge de honte, cherchant des yeux la sortie pour m’y engouffrer au plus vite. Je me collais derrière lui, tentant maladroitement de faire écran entre les protubérances carrées formées par les flacons dans ses poches et les caméras de surveillance.

J’étais coite. Terrassée par l’incrédulité. Toujours inerte, je priais pour que mon supplice s’arrêtât au plus vite, mais j’étais à Bonneveine, et la perspective de rentrer chez moi en empruntant les transports en commun m’apparaissait comme une épreuve encore plus insurmontable.

Mais il était dit que mon supplice ne touchait pas encore à sa fin.

Jacky, toujours inconscient de mon malaise, me trainait maintenant chez Sephora. Vous me direz, mais enfin Ginette Pompadour, votre perspicacité légendaire n’a pas fait sonner les trompettes du déjà vu ??? N’avez-vous pas envisagé que Jacky réitérerait ses exploits de rapine dans le temple du parfum en libre service ??? Et je vous répondrai, que nenni mes amis ! Pas un instant, j’étais anesthésiée je vous dis !

Devant le rayon des parfums féminins, je humais distraitement un démonstrateur, je tentais de me fabriquer une bulle virtuelle pour m’isoler, quand j’entendis un « shplok » annonciateur d’un rebondissement dans le fil de mes aventures cleptomanes. Jacky venait de faire basculer le démonstrateur d’un Dolce Gabanna dans un sac. Mon sang ne fit qu’un tour et mes poils se hérissèrent de terreur, tant légitime était la crainte que cet abruti n’ait choisi de déposer ce butin dans mon sac. Après une vérification rapide, je constatais qu’il n’avait tout de même pas eu ce culot. Le démonstrateur était dans le sac de Jacky. « Pour toi, cadeau ! » me dit-il une fois sorti, d’un ton triomphant, avec le rictus modeste de celui qui a la certitude d’offrir un cadeau inestimable.



J’empochais le flacon (foutu pour foutu, il était volé, on n’allait pas le rendre !) et manifestait mon intention de regagner mon foyer au plus vite. Il était 17h, j’avais perdu 3 kgs d’eau suite à la sudation provoquée par l’effroi, j’avais perdu aussi au passage l’estime de moi-même pour avoir suivi sans broncher cet imbécile, mais j’avais gagné la certitude que plus jamais je ne le verrais !!

En y repensant, je me dis que ce n’est pas tant le fait qu’il ait volé qui m’a choquée, c’est surtout la petitesse du geste, voler des démonstrateurs de parfum de seconde zone, ce n’est définitivement pas « Ginette Pompadour spirit ».



La prochaine fois mes amis, je vous raconterai l’épilogue de cette folle aventure : « La soirée de l’angoisse »… que de rebondissements en perspective !!!!

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