mercredi 20 février 2013

La tactique du couturier pervers

D’aucuns me reprochent, fort injustement, de taper uniquement sur les hommes dans cette chronique. Les femmes y seraient érigées en victimes et les hommes en amants calamiteux /alcolo/gay/stupides/radins/égoïstes/doigts crochus/haleine de bouc.




Je vais donc vous narrer aujourd’hui l’histoire arrivée récemment à un jeune ami de ma connaissance. Jeune ami hétéro, je le dois de préciser, tant ce détail a son importance dans l’incongruité de la situation qui va suivre.



Cet ami, que nous appellerons Jean Mouloud, pour plus de fun et d’anonymat (et aussi de mixité des cultures, des origines et de visualisation littéraire des minorités), se promenait tranquillement par une belle après-midi dans les rues de la ville, sans but précis, avec la belle inconscience et l’innocence que lui procurait sa jeunesse.



Quand tout à coup, un inconnu l’aborde ; lui, entre mille, il choisit Jean Mouloud, comme de par hasard, et se met à lui expliquer qu’il est dans la mouise et que seul Jean Mouloud peut le sauver. Jean Mouloud, il est très gentil et il aide son prochain dès qu’il le peut. N’écoutant que sa bonté, il demande donc à l’inconnu de lui exposer son problème.



L’inconnu est un couturier (hum hum…loin de moi l’idée de colporter des clichés crasseux et indignes mais, force est de constater, que souvent, pas toujours, mais souvent, dans la couture, et quand on est un homme, on aime tout ce qui est délicat, artistique, on est sensible, on est …gay donc). L’inconnu doit faire « de toute urgence » un shooting photo pour un modèle de pantalon homme « rarissime et sur mesure » et son mannequin lui a fait faux bond. L’inconnu explique à Jean Mouloud qu’à vue de nez, il fait peu ou prou les mêmes mensurations que le mannequin en question. Et qu’il lui sauverait donc la vie en acceptant de faire les derniers essayages.



Jean Mouloud accepte évidemment de rendre ce service et suit l’inconnu dans son atelier. Atelier de couture tout à fait classique : des portants de fringues, des chutes de tissus, des ordi, des appareils photos, des machines à coudre. Bref, Jean Mouloud se sent totalement rassuré : il est entre les mains d’un vrai pro.

L’inconnu lui demande alors de se mettre en caleçon (histoire d’être bien à l’aise) et lui explique qu’il va devoir le mesurer car la braguette du fameux pantalon prototype n’est pas satisfaisante : elle est peut-être un peu trop haute et il n’est pas sûr qu’on puisse uriner en toute quiétude et « qu’on puisse sortir sa bite ».

Donc, Jean Mouloud, toujours totalement confiant et voyant dans cette excuse PARFAITEMENT GROSSIERE ET CALAMITEUSE une explication tout à fait probable, se met en caleçon et laisse l’inconnu commencer ses mesures. Mesures qui l’obligent à déplacer de quelques centimètres sur la gauche ou la droite la virilité de Jean Mouloud…

Jean Mouloud se laisse sereinement tripoter sans voir le mal : il est avec un pro, il rend service, il est dans un VRAI ATELIER AVEC DES MACHINES A COUDRE.



L’inconnu demande soudain à Jean Mouloud s’il est pudique (à priori, tout le monde a compris à ce moment du récit que Jean Mouloud, en plus d’être très naïf, n’est pas pudique) et s’il peut enlever son caleçon car il doit prendre des mesures plus précises et jauger de l’espace entre son nombril et la base de son membre. Jean Mouloud, toujours investi à mort dans son rôle de mannequin d’un jour, s’exécute et tombe le calbute.



Jugeant que les gestes du couturier étaient très pro et parfaitement dénués de sensualité ou d’érotisme, Jean Mouloud se laisse manœuvrer en toute quiétude. L’inconnu lui demande alors en riant, sur le ton de la plaisanterie virile entre camarades de vestiaire, s’il veut en profiter pour qu’on lui mesure le membre. Jean Mouloud décline poliment.

Le couturier se met alors à le flatter et à lui exprimer combien il devrait être fier de ses attributs dont les mesures dépassent à son avis les normes européennes en vigueur.



C’est contre toute attente à ce moment-là, qu’un vilain soupçon s’immisce dans l’esprit de Jean Mouloud : il est debout, à poil, avec un mec à ses genoux en train de lui mesurer la teub…Soudain, Jean Mouloud a un doute sur les véritables motivations du couturier. Il entrevoit que le monde n’est peut-être pas peuplé que de gens innocents à la libido inexistante et que s’il reste encore quelques secondes de plus il aura pour toujours des doutes sur sa propre motivation….



N’écoutant que son courage il demande poliment au couturier si les mesures sont terminées et lui explique qu’il aimerait bien rentrer chez lui maintenant. Le couturier, sans doute déjà satisfait par le spectacle qui lui avait été offert gratuitement et sans réticence aucune, lui confirma qu’il en avait fini avec lui. Jean Mouloud ramassa donc prestement son calbute, en restant de dos contre le mur, tel un otage menacé par des terroristes sur-armés, et se rhabilla non moins prestement pour fuir aussi vite qu’il le pouvait.



Jean Mouloud m’a avoué s’être senti abusé, quasi violé. Comme quoi la naïveté n’est pas une exclusivité féminine. Ce qui est plutôt rassurant.







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